Si la vie ne nous
inspire que rarement une réflexion profonde car, comme tout un
chacun, nous nous contentons de la vivre tout simplement, que
peut-elle bien signifier pour celui qui, de par un choix sans doute
non mesuré, en est coupé, privé à tout jamais? Se
doit-il encore de payer un tribut pour s'affranchir de la nuit, de la
mort en laquelle l'existence a désormais plongé son âme?
Comme vous, il est
un moine de la Chartreuse qui devait bientôt le découvrir...
NOUVELLE
LE MOINE DES CHARTREUX ou L'ANNEAU
DU PRIEUR
Frère Bernardo, du
fond de son silencieux tombeau devenu sa demeure, n'aspirait plus
qu'à vivre et ce désir s'était transformé en une obsession depuis
que le prieur était mort. Ce dernier n'avait-il pas été couché
pour l'éternité avec cet anneau dont il n'avait jamais pu se
défaire? Cet anneau auquel s'attachaient tant de souvenirs de
jeunesse et d'amour... Le posséder, c'était tenir la vie entre ses
mains, c'était enfin pouvoir rêver et s'évader de ce sépulcre
dans lequel il était à jamais enseveli...
Alors, cet esprit torturé par des images de liberté et de félicité, soumis incessamment à la tentation, ne pouvait que succomber.
Alors, cet esprit torturé par des images de liberté et de félicité, soumis incessamment à la tentation, ne pouvait que succomber.
Profitant de la
nuit, notre homme, le cœur inondé de lumière devant une telle
promesse de bonheur, descendit donc au caveau pour se saisir de
l'anneau.
Mais l'espérance
n'est pas tout... La peur, elle aussi, sans doute aiguillonnée par
une conscience encore non complètement assoupie, tenaillait le
moine...
Allait-il abandonner sa coupable quête? Assurément non!
Allait-il abandonner sa coupable quête? Assurément non!
La convoitise qui
l'animait sut sans peine faire taire ses scrupules et le pousser à
fébrilement arracher la bague de la main du mort.
Cette faute
irrémédiablement commise, il ne restait plus qu'au moine à
retrouver la vie qui était sienne, une vie paisible aux couleurs
désormais de ses rêves....
Pourtant, châtiment
ou accident, qui peut savoir, ce fut la mort, ironie du sort, qui
lui offrit enfin le repos de son âme et lui ouvrit les portes de la
vie... Oui, de la vie, de la vie éternelle!
Dans cette très
courte nouvelle, Gustave Flaubert nous conte,
grâce à un style vivant et agréable et par le biais de
l'expression d'une vaste palette de sentiments, la bien morne vie et
paradoxalement, bien triste fin d'un chartreux dont le tragique
monologue n'était au final que le reflet de sa terrible solitude,
dont la vie n'était qu'une longue mort et la mort, l'assurance d'une
vie dans l'éternité.
A lire...
- Pour le plaisir de savourer quelques instants les lignes tracées sous la talentueuse plume de ce grand auteur de la littérature française.
- Pour réfléchir fugacement aux notions existentielles de la vie, de la mort, au destin de celui qui, pour avoir voulu vivre, trouva la mort.
En prolongement, je
vous invite ici à écouter l'enregistrement audio (avec bruitages, s'il vous plaît!) de cette
nouvelle... Et à regarder également la vidéo...
[Une production BiblioBooksAudio]
[Une production BiblioBooksAudio]