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dimanche 22 septembre 2013

LU POUR VOUS: LE MOINE DES CHARTREUX ou L'ANNEAU DU PRIEUR





Si la vie ne nous inspire que rarement une réflexion profonde car, comme tout un chacun, nous nous contentons de la vivre tout simplement, que peut-elle bien signifier pour celui qui, de par un choix sans doute non mesuré, en est coupé, privé à tout jamais? Se doit-il encore de payer un tribut pour s'affranchir de la nuit, de la mort en laquelle l'existence a désormais plongé son âme?
Comme vous, il est un moine de la Chartreuse qui devait bientôt le découvrir...

NOUVELLE




LE MOINE DES CHARTREUX ou L'ANNEAU DU PRIEUR 



Frère Bernardo, du fond de son silencieux tombeau devenu sa demeure, n'aspirait plus qu'à vivre et ce désir s'était transformé en une obsession depuis que le prieur était mort. Ce dernier n'avait-il pas été couché pour l'éternité avec cet anneau dont il n'avait jamais pu se défaire? Cet anneau auquel s'attachaient tant de souvenirs de jeunesse et d'amour... Le posséder, c'était tenir la vie entre ses mains, c'était enfin pouvoir rêver et s'évader de ce sépulcre dans lequel il était à jamais enseveli...
Alors, cet esprit torturé par des images de liberté et de félicité, soumis incessamment à la tentation, ne pouvait que succomber.

Profitant de la nuit, notre homme, le cœur inondé de lumière devant une telle promesse de bonheur, descendit donc au caveau pour se saisir de l'anneau.
Mais l'espérance n'est pas tout... La peur, elle aussi, sans doute aiguillonnée par une conscience encore non complètement assoupie, tenaillait le moine...
Allait-il abandonner sa coupable quête? Assurément non!

La convoitise qui l'animait sut sans peine faire taire ses scrupules et le pousser à fébrilement arracher la bague de la main du mort.
Cette faute irrémédiablement commise, il ne restait plus qu'au moine à retrouver la vie qui était sienne, une vie paisible aux couleurs désormais de ses rêves....

Pourtant, châtiment ou accident, qui peut savoir, ce fut la mort, ironie du sort, qui lui offrit enfin le repos de son âme et lui ouvrit les portes de la vie... Oui, de la vie, de la vie éternelle!

Dans cette très courte nouvelle, Gustave Flaubert nous conte, grâce à un style vivant et agréable et par le biais de l'expression d'une vaste palette de sentiments, la bien morne vie et paradoxalement, bien triste fin d'un chartreux dont le tragique monologue n'était au final que le reflet de sa terrible solitude, dont la vie n'était qu'une longue mort et la mort, l'assurance d'une vie dans l'éternité. 



A lire...
  • Pour le plaisir de savourer quelques instants les lignes tracées sous la talentueuse plume de ce grand auteur de la littérature française.
  • Pour réfléchir fugacement aux notions existentielles de la vie, de la mort, au destin de celui qui, pour avoir voulu vivre, trouva la mort.




En prolongement, je vous invite ici à écouter l'enregistrement audio (avec bruitages, s'il vous plaît!) de cette nouvelle... Et à regarder également la vidéo...  
[Une production BiblioBooksAudio]